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De l’économie du contenu à l’économie de liens

Durement affectée par les nouvelles règles d’une économie  qui doit tenir compte de  l’abondance, l’industrie des médias a vu son modèle de revenu remis en question par le déplacement des annonceurs vers d’autres espaces susceptibles d’attirer une audience, plus importante et/ou plus qualifiée.

Les observateurs et commentateurs de l’évolution de l’industrie s’entendent : la publicité n’a plus besoin des médias. La publicité a plus intérêt à suivre les individus auxquels elle s’adresse qu’à se fixer à des contenus. Et cela, en raison de la croissance exponentielle de l’offre de contenus, et de l’attention implicitement limitée des individus.

Ce nouveau paradigme devrait, cette fois, placer le consommateur au centre des stratégies d’affaires (production, distribution, marketing, …)

Extraits pertinents d’une entrevue avec Jeff Bezos (Amazon) sur l’innovation et la résilience des entreprises :

In tough times, focus on the customer
/…/That said, Bezos was clear in pointing out that his company looks at everything from a customer’s standpoint. « We do make business decisions in a very deliberate way, » he said. « We work backwards from customer needs. »

Se coller aux individus plutôt qu’aux contenus implique le passage d’une économie de contenus à une économie de liens. Jeff Jarvis a formulé les quatre impératifs de l’économie de liens, dont celui-ci:

2. The recipient of links is the party responsible for monetizing the audience they bring. In the old content-economy model of syndication, the creator sells content to another and the one who syndicates has to come up with the ad or circulation revenue sufficient to pay for it. Now in the link economy, it’s reversed: When you get traffic, you need to figure out how to benefit from it.

Ce qui l’amène à conclure, dans un autre billet sur l’économie de liens, que le contenu n’est rien sans les liens.

Links can be exploited and monetized; get links and you can grab audience and show ads and make money. Content is becoming a cost burden, what you have to have to get the links, but in and of itself, content can’t draw value without an audience, without links.

Dans la nouvelle économie, les médias ont donc besoin de Google, des blogues, des réseaux sociaux, des Delicious, YouTube, Netvibes, Twitter et autres espaces de rediffusion. S’isoler en fermant leur contenu, pourrait mettre leur survie en péril.

La logique de l’abondance

La logique de l’abondance rend impraticables les modèles d’affaires actuels qui sont basés sur la rareté.

Le médium de communication qu’est le Web n’étant plus le privilège de quelques interlocuteurs, les standards et repères d’une certaine économie sont bouleversés par cette nouvelle redistribution des moyens.

Avec le Web est arrivée l’abondance : un choix toujours grandissant de contenus, de réseaux et d’outils. Quels sont les changements prévisibles de l’abondance sur les modèles économiques actuels, basés sur la rareté (contrôle de l’accès) ? Un économiste*** a tenté de décrire cette logique de l’abondance et ses conséquences sur les modèles économiques actuels, et également sur les organisations. En voici un aperçu :

Le développement de la logique d’abondance qui prévaut dans la nouvelle économie est étroitement associée à l’effet de réseau.

L’abondance repose sur les réseaux identitaires et la confiance; elle n’est donc pas favorable aux monopoles. Les stratégies traditionnelles de positionnement et d’établissement de standards deviennent donc éphémères et sans garantie de résultats.

La logique de l’abondance rend presque impraticable la fidélisation de la clientèle. L’abondance permet la liberté de choix: le paradis du consommateur.

***Article publié par Juan Urrutia Elejalde publié sur le web sous le titre La Lógica de la Abundancia. Ce monsieur est économiste et titulaire de la chaire d’analyse économique fondamentale de la Universidad del País Vasco, ou l’Université du pays basque (Euskal Herriko Unibertsitatea), prés de Bilbao, en Espagne. Mille excuses à l’auteur si mon interprétation ne rend pas justice au texte original.

Et l’infrastructure technologique ?

Une lettre d’opinion de Jonathan Vianou, journaliste et ingénieur, dans Le Devoir, relève l’absence de mesures concernant l’infrastructure technologique dans le budget fédéral récemment présenté le gouverment de Stephen Harper.

Les programmes d’infrastructure qui y sont présentés sont créateurs d’emploi et essentiels au maintien des voies de transport, cependant, selon M. Vianou, il y a de quoi s’alarmer du manque d’intérêt pour le développement de l’économie numérique au Canada.

Dans l’économie du savoir, Internet haute vitesse doit être considéré comme essentiel, au même titre que la poste, le téléphone et la télévision. Or, le Canada perd progressivement son leadership à ce chapitre. Deuxième en 2002 parmi les 30 pays membres de l’OCDE, en termes d’abonnés à Internet haute vitesse, il récolte maintenant une 10e position. Pire, il se classe 27e pour son rapport qualité de vitesse et prix! Sans compter que la limite de téléchargement moyenne canadienne de 60 Go par mois est rapidement atteinte, comparativement à celle américaine, qui est de 250 Go.

Le Canada ne semble pas vouloir suivre les propositions de l’OCDE pour l’intégration de la cyberéconomie. De sa position de tête, en 2001, le Canada a rapidement perdu du terrain, tant pour la tarification que pour laqualité du service.

Chiffres pour le moins déconcertants publiés par  David Crane, un chroniqueur de la revue d’affaires BCBusiness dans son article From First to Worst:

Canada’s broadband prices are higher than 20 other countries in the Organization for Economic Co-operation and Development (OECD). In fact, Canadian prices are nearly 30 times as high as those in Japan, 12 times as high as in France, 11 times as high as in Sweden and just over 10 times as high as in Korea.

Canada also has one of the slowest average advertised broadband speeds, ranking 15th in the OECD. Compared with Canada, Japan’s downloading speeds are nearly 12 times as fast, France’s and Korea’s nearly six times as fast and Sweden’s three times as fast.

En milieu rural,  et surtout pour les régions éloignées des centres de services, l’accessibilité aux services par Internet constitue un facteur essentiel du développement économique et social.  Pourtant, l’accès Internet à haute vitesse n’est pas encore disponible sur tout le territoire du Québec, sur la Côte-Nord, en Gaspésie  et même dans certaines aglomérations de l’Estrie. Encore moins accessible sur l’ensemble du territoire canadien (env. 80% des communautés n’y ont pas accès).

Et pour ajouter à la somme des obstacles au développement de la nouvelle économie : la pratique de ralentissement délibéré du trafic (throttling), récemment autorisée par le CRTC,  par les géants des télécommunications.

Tempête sur la presse mondiale: il y aura des morts

Les problèmes auxquels fait face la presse (ceci inclut les magazines) mondiale sont analysés dans le rapport The Perfect Storm publié par Éric Scherer, directeur, analyse stratégique, à l’Agence France Presse, dans le cadre des États généraux de la presse (France).

Ces constatations du mileu de la presse française s’ajoutent à celles émises plus tôt cette années lors des différentes rencontres de l’industrie.

Déclin du display ad

Baisse des revenus publicitaires en ligne (et non plus uniquement des revenus sur papier). Ceci, dû en partie, à la baisse du CPM (coût par mille impressions ou pages vues) et au succès de la publicité contextuelle à la recherche (search ad) sur le simple affichage publcitaire (display ad).

Ceci est corroboré par la publication de l’étude annuelle de Morgan Stanley sur les tendances du Web.

Suprématie de Google

Google poursuit sa domination écrasante du marché publicitaire en ligne. Le taux de commission de Google sur AdWords et AdSense est de 70%.

Insuffisante maîtrise du Web

10 fois moins bien référencé que leurs concurrents « purs Web », alors que leur contenu en ligne est, de loin, beaucoup plus volumineux.

Deux crises

Remise en cause des modèles actuels de la presse. Deux crises :conjoncture (économie) et mutation structurelle (La presse est à la fois touchée par le changement qu’apporte Internet et acteur du changement). Bruno Patino (Directeur, France Culture), États généraux de la presse écrite, Pôle de réflexion Internet / numérique.

Bruno Patino, a réalisé le rapport sur les tendances, défis et pistes de réflexion de l’édition numérique pour le Minstère de la Culture (France).

Mieux intégrer la cyberéconomie à l’économie globale

Le futur de l’économie Internet. Rapport de la réunion Ministérielle de l’OCDE, Séoul juin 2008.

La réunion précédente, sur le même thème, avait eu lieu à Ottawa en juin 1998. Contenu du document:

  • Mise en évidence des moyens pour stimuler le développement de l’économie Internet.
  • Proposition de principes directeurs pour élaborer des politiques et des pratiques pour préparer cette économie future.

Notés:

Défis du développement de l’économie Internet

  • Rendre l’Internet accessible à tous et partout.
  • Promouvoir l’innovation, la concurrence et le choix de l’utilisateur sur l’Internet.
  • Sécuriser les infrastructures d’information critiques et parer aux nouvelles menaces.
  • Assurer la protection des informations personnelles, le respect des droits de propriété intellectuelle et, de façon plus générale, un espace Internet sécurisé qui offre une protection aux individus, notamment aux mineurs et autres groupes vulnérables.
  • Promouvoir une utilisation sécurisée et responsable de l’Internet.
  • Créer un environnement qui encourage l’investissement dans l’infrastructure, des niveaux plus élevés de connectivité et des applications et services innovants.

Propositions concrètes que la classe politique aurait intérêt à bien intégrer

Propositions visant plus particulièrement les domaines de l’administration publique, de la santé et de l’information (technologie de l’information).

Nos fournisseurs de services de télécommunication devraient médités sur la section consacrée à  l’autonomisation des consommateurs (Les services de communication étant devenus plus complexes, il est de plus en plus difficile pour les onsommateurs d’évaluer et de comparer les offres.)

La neutralité technologique est essentielle pour le développement économique, n’en déplaise aux fournisseurs de plateformes logicielles et services de télécommunication. Dans le traitement des questions technologiques, favoriser la neutralité technologique, l’interopérabilité et l’élaboration de normes ouvertes.

Plus d’adresses IP pour plus d’accessibilité

Il n’y a pas que les numéros de téléphone qui s’épuisent. L’espace actuel d’adresses IP sera épuisé dans quelques années. Il doit être étendu pour permettre à des milliards d’individus et d’ordinateurs de se connecter à l’Internet, et par conséquent, à Internet de s’étendre et à la cyberéconomie de croître. L’OCDE a souligné la nécessité du déploiment d’un nouveau protocole Internet.

Le livre numérique – Dématérialisation et désintermédiation

Du rapport, Le livre numérique, présenté par Bruno Patino (Le Monde Interactif) à la Ministre de la culture et de la communication (france), Christine Albanel, des constats très pertinents et des recommandations très sages. Mais surtout des mots clés qui ont un poids certain pour l’orientation des futurs développements.

Dématérialisation

  • En devenant numérique, le livre objet devient livre droit.
  • Déplacement de la valeur de propriété vers la valeur d’usage.

Fragmentation

  • Le livre numérique devient des produits d’exploitation: feuilleton via téléphone portable, commentaires de l’auteur, vidéo d’entrevue, documents inédits.
  • Également, pourquoi ne pas y relier les études ou thèses qui auraient été publiées sur l’auteur ou le sujet, des schémas, des index, les meilleures citations et même les meilleurs commentaires ou pastiches des lecteurs.

Désintermédiation

  • Multiplication des nouveaux modes de communication.
  • Le maillon faible de la chaîne sera (est déjà ?) la diffusion et la distribution.

Interopérabilité

  • Émergence d’une grande variété de supports (du téléphone portable à la tablette de lecture, en passant par la console de jeu).
  • Des DRM, oui, mais avec des solutions qui favorisent l’interopérabilité.

Propriété intellectuelle

  • Puisque des acteurs qui n’appartiennent pas au secteur du livre sur papier peuvent s’y inviter (certains, comme Orange, le feraient très bientôt) il faut favoriser au maximum les détenteurs de droits.
  • Préserver la relation auteur-éditeur: rester dans le cadre d’un contrat unique pour favoriser un continuum d’exploitation d’une même œuvre. L’ajout d’une clause spécifique relève des relations contractuelles entre les auteurs et les éditeurs.
  • Éviter à tout prix la mise en place de formats propriétaires, qui risquent de favoriser l’appropriation de la valeur par un opérateur technique (ex.: Amazon avec sa tablette de lecture).

Métadonnées structurées

  • Structurer les métadonnées (format commun pour les grands flux d’information comme Électre).
  • Non seulement rapprocher les bases des acteurs, mais les transformer en une base unique dont les conditions d’accès devront être repensées.
  • Si les métadonnées permettent en partie d’authentifier les œuvres numériques (comment s’assurer qu’il s’agit bien d’une œuvre de l’auteur, de la bonne version, etc.), il faudra compter sur la communauté d’intérêt pour valider et relier entre eux les différents fragments de contenu (comme Wikipédia).

États généraux de la presse écrite en France

Le président Sarkozy a identifié la cause des difficultés que vit l’industrie de la presse: Internet.

« J’ajoute que le problème d’Internet est considérable, parce que comment voulez-vous que les gens achètent leurs journaux en kiosque s’ils sont gratuits sur Internet ? »

La solution: améliorer la distribution.

« Il y a un gigantesque problème de distribution. Il faut aider la presse écrite à faire du portage à domicile qui créera des emplois et qui permette d’avoir le journal tôt le matin », a déclaré M. Sarkozy avant d’ajouter : « Il faut également multiplier les points de vente de journaux parce qu’aujourd’hui, dans les grandes villes, pour trouver un journal, c’est un plein travail. »

Il a donc annoncé la tenue prochaine d’états généraux de la presse écrite.

À suivre.

Le cas de la télévision publique, lui, reste en suspend puisque le président a rejeté l’augmentation des redevances pour compenser la perte des revenus publicitaires. Quelqu’un finira bien par recevoir l’addition.

À qui profite l’extension des droits d’auteur ?

Pétition de l’Electronic Frontier Foundation

L’EFF a lancé récemment une pétition, Sound Copyright, pour dénoncer l’extension des droits des auteurs-interprètes, à 95 ans. Ceci repousse donc encore plus loin l’arrivée des oeuvres dans le domaine public (autour de 50 ans, selon les pays et types d’œuvre).

Selon le Centre for Intellectual Property and Information Law, de Cambridge en Angleterre, cette extension ne génère que peu de revenus additionnels pour les auteurs-interprètes. Il nuirait, par contre grandement à la culture et à l’économie.

Recoller les morceaux

Découverte: le blogue de David Weinberger, auteur du livre Small Pieces Loosely Joined. Weinberger est un créateur de superbes expressions, comme le titre mentionné précédemment. Il est également initiateur d’échanges (qualifiées de global conservations) à propos du partage des connaissances et de l’évolution technologique comme accélérateur de changement.

The Cluetrain Manifesto – The End of Business as Usual est un autre de ses livres, mentionné par Mitch Joël (Twist Image) parmi les 5 ouvrages de marketing à lire. Dans cet ouvrage, toujours à propos de conversations (les marchés sont des conversations), Weinberger reproche aux entreprises leur langage corporatif, auto promotion convenue, et qui les rend étrangères aux réseaux sociaux qui se tissent sur le Net.